Entre deux

 






Cette année je peux me reposer le mardi soir et laisser mon sac de cours fermé au pied du bureau. Je travaillerai demain.
Je suis allée au supermarché avec Gustave pour acheter du steak hâché pour faire des courgettes et tomates farcies. Cela m'a fait énormément de bien de cuisiner sans hâte.

J'avance dans la semaine, je m'éloigne doucement de la nouveauté crue de la rentrée. Quelques repères se mettent en place. Pour autant je me questionne beaucoup sur ma vocation, sur mon travail. J'ai la chance de faire un métier que j'aime et de ne pas vouloir en faire d'autre pour le moment. Mais j'ai l'impression de tourner un peu en rond, surtout en seconde. Je n'ai pas envie de revoir toujours la même chose, faire de la discipline, entendre les mêmes plaintes. Je deviens plus sensible aux critiques, peut-être parce qu'elles ont toujours une part de vérité. Je manque certainement d'idées nouvelles. Peut-être parce que je vieillis. Je ne sais pas.

En revanche retrouver un groupe de spécialité en première me donne un vent de fraîcheur. Je retrouve mes vraies amours: l'art, la littérature. Analyser, ça je sais bien faire. J'espère embarquer le plus de monde possible avec moi.

J'entends parler régulièrement de mon ancien lycée. Presque chaque semaine. D'anciennes collègues, croisées ici ou là, d'autres, qui y sont passés et veulent y retourner. Je ne cesse de savoir ce que j'ai perdu. J'attends patiemment de retrouver quelque chose de semblable, un sentiment qui se rapproche de celui qui m'a accompagnée pendant ces huit années: aimer le public en face de moi, me sentir respectée par ma hiérarchie, avoir des conditions de travail correctes. J'ai perdu un peu de tout cela. Le public est différent, moins homogène; j'aimais les gamins des villages, qui parlent de champs et de vignes. J'ai des gosses de la ville, plus durs parfois, avec un terroir en moins. Je crois que je tiens le mot: j'étais dans un lycée imbriqué dans un vrai terroir. Les gens de T. me manquent.

Je rêve parfois de redemander une mutation là-bas, quand la vie aura coulé, quand celui que j'ai quitté aura lui aussi quitté les lieux. Cette pensée, aussi farfelue soit-elle, me réconforte.

J'aime écrire ici, malgré la fatigue et le temps supplémentaire que prend l'écriture d'un post avec chargement de photos. Mais il m'offre un temps précieux, supplémentaire lui aussi. La tension descend petit à petit à mesure que les pensées se figent dans des mots choisis. Je retiens ce soir ceux de réconfort et de terroir. Ils me donneront encore à réfléchir.

Commentaires

  1. Vos élèves ont de la chance d’avoir une prof si peu routinière ! BUSSIERE 5132

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  2. Je comprends ta nostalgie !
    Isa

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